Service de Presse

Margaret Killjoy est une femme engagée dans la vraie vie : militante anarchiste, féministe et anti-fasciste, elle est notamment à l’origine du groupe de black métal Feminazgûl à la fin des années 2010. Vivant dans une communauté anarchiste, Un pays de fantômes nous permet d’en apprendre plus le mode de fonctionnement d’une telle communauté, chez Pocket et avec l’étiquette “Les étoiles montantes de l’imaginaire”.

Dimos Horacki, au service de la propagande…

La Borolie est un empire florissant. La population est sous contrôle et rien ne semble pouvoir déstabiliser le statu quo. Néanmoins, l’Empire est intéressé pour récupérer les territoires proches des frontières et tout particulièrement les Cerracs. Le général Wilder est destiné à prendre la tête de l’armée en charge de tordre le bras de cette résistance qui insupporte le pouvoir. Et de façon à faire d’une pierre, deux coups, le journaliste Dimos Horacki sera de la partie pour communiquer sur l’avancement du combat, un moyen comme un autre de s’assurer du bon niveau de propagande.

Alors que les troupes s’avancent, la victoire semble plus difficile à acquérir que ce qui semblait se dessiner à l’origine. Pire, Dimos va être envoyé avec une troupe restreinte pour porter un coup fatal à la résistance… Comme une évidence, cela ne se déroulera pas comme prévu et Dimos se fera capturé. Il découvrira alors que le monde tel qu’on lui avait présenté n’est peut-être pas aussi manichéen qu’il l’imaginait.

… pour un roman anarchiste

Deux mondes se font face dans ce roman du début des années 2020. D’un côté, un Empire bien établi qui continue à s’étendre de façon à conserver leur avantage. Pour autant, il semble qu’au sein des gouvernants, des questions se posent sur le moyen de remobiliser la population, notamment pour justifier une guerre avec les voisins montagnards. Pour cela, ils vont s’appuyer sur un journaliste en disgrâce, même si je ne comprends pas trop ce choix (peut-être parce qu’il est plus sacrifiable que les autres).

De l’autre côté, des combattants affrontent les forces de l’Empire dans une forme de guerilla qui les rend imprévisibles. Dimos va se retrouver prisonnier des rebelles et va découvrir au fur et à mesure leur façon de vivre et ce qui les fait vibrer.

Les convictions personnelles de l’autrice vont forcément influencer la narration. A commencer par un élément qui nous saute au visage dès les premières pages : l’Empire n’est pas sympathique. Il est violent, il est prétentieux et il veut absolument étendre son pouvoir. A cela s’ajoute le fait que cette guerre est menée d’un côté par des militaires et de l’autre par des individus qui vont apprendre à se battre pour se protéger et protéger les leurs.

On peut ajouter aussi que le mode de vie anarchiste est bien plus proche de la nature et bien plus permissif que tout ce que l’on pourrait imaginer. Bref, le monde des montagnards est définitivement le “bon” côté du monde de Margaret Killjoy, avec une ouverture d’esprit beaucoup plus large.

Des personnages réussis

A noter que la force du roman est pour beaucoup dans la construction des personnages à commencer par Dimos Horacki. Même si les histoires sont totalement différentes, je dois avouer avoir fait un lien entre ce récit et Ecotopia d’Ernest Callenbach. Dans les deux cas, ceux qui sont censés faire la propagande se retrouve à ouvrir les yeux et par effet de bord à le communiquer.

La construction de Dimos et son évolution sont tout particulièrement intéressant et permettent de découvrir le monde des anarchistes de façon relativement naïve. Un roman préfacé par l’auteur Patrick K. Dewdney, à qui l’on doit le Cycle de Syffe.

Un roman engagé donc, donnant une autre vision de l’anarchie mais qui aurait mérité d’être un peu plus critique du côté de l’anarchie.

Pocket (Mars 2024) – Les Etoiles Montantes de l’Imaginaire – 266 pages – 8,30 € – 9782266336178
Traduction : Mathieu Prioux (Etats-Unis)
Titre Original : A Country of Ghosts (2022)
Couverture : Germain Barthélémy

Dimos Horacki est un journaliste en disgrâce travaillant pour la Gazette de la Borolie, empire qui a tourné son regard et son armée vers les territoires libres des montagnes voisines. Envoyé sur le front, il est chargé d’écrire le portrait flatteur d’un général en vue, à des fins de propagandes. Rapidement capturé, lors d’un guet-apens, par les ennemis de l’Empire borolien, il est emmené au coeur des Cerracs. Passant de fermes en villages et de groupes de miliciens à d’autres, le reporteur découvre l’horreur des guerres expansionnistes de son pays et le courage des peuples entrés en résistance. Face à la détermination de ces individus réunis sous une même bannière, celle de la liberté et de l’indépendance, ses convictions vacillent… jusqu’à épouser leur combats ?